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El-Smaïm : quarante jours où le désert devient un hôpital à ciel ouvert

Enfouis jusqu’au cou, les patients affrontent la chaleur du désert pour apaiser leurs douleurs.

Au cœur du sud-ouest algérien, une pratique ancestrale connaît un regain d’intérêt. Chaque été, des dizaines de malades, principalement des personnes âgées, entreprennent un long voyage depuis les hauts plateaux glacials de Naâma, Méchria, Aïn Séfra, Mekmen Ben Amar ou encore Aïn Ben Khelil, pour rejoindre les dunes de Taghit et Béni Abbès, situées dans la wilaya de Béchar. Leur objectif : s’offrir une cure singulière, fondée sur l’enfouissement du corps dans les sables brûlants, afin d’atténuer les douleurs du rhumatisme et des affections articulaires.

La dureté du climat, source de souffrances chroniques

Ces hommes et ces femmes, souvent marqués par une vie entière de labeur dans l’agriculture, le pastoralisme ou le bâtiment, racontent un même parcours : des années de travaux physiques éprouvants, aggravés par des hivers rigoureux. Avec l’âge, ces conditions laissent leur empreinte sous forme de douleurs persistantes aux articulations. Le sable chaud du Sahara apparaît alors comme une réponse naturelle, presque providentielle, pour soulager des corps usés par le temps et le froid.

« El-Smaïm », une fenêtre idéale pour la thérapie

La période la plus recherchée reste celle de « El-Smaïm », quarante jours de chaleur extrême qui marquent le cœur de l’été. C’est à ce moment-là que le sable atteint une température optimale, permettant une thérapie plus efficace selon les habitants. Enfouir le corps jusqu’au cou dans ces dunes incandescentes permettrait, affirment-ils, à la chaleur de pénétrer les os et de « chasser l’humidité » grâce à une transpiration abondante.

Des témoignages émouvants

Le hadj Miloud, originaire de Naâma, raconte : « Le froid augmente mes douleurs. Après une séance d’enfouissement à Béni Abbès, j’ai ressenti un soulagement que je n’avais plus connu depuis des années ».
De son côté, Khadidja, venue d’Aïn Séfra, confie : « Quand le sable chaud enveloppe ton corps, tu sens la douleur s’évaporer peu à peu avec la sueur ».
Ces récits se répètent parmi les curistes, venus parfois de tout le pays, réunis par une même quête de guérison naturelle.

Une tradition qui défie le temps

Cette thérapie, connue localement sous le nom de « transpiration par le sable », consiste à s’enterrer partiellement pendant 10 à 20 minutes. Les habitants du désert la pratiquent depuis des générations, convaincus de son efficacité. Et si les médecins recommandent la prudence pour éviter les risques liés aux températures extrêmes, l’engouement reste intact. Chaque été, les dunes deviennent à la fois hôpital à ciel ouvert et lieu de villégiature. Entre palmeraies et étendues infinies, la cure se transforme en une expérience qui allie soin, spiritualité et découverte des paysages sahariens.

Une destination thérapeutique et touristique

Taghit et Béni Abbès ne sont plus seulement des escales pour les passionnés du désert, mais aussi pour les malades en quête de soulagement. Cette alliance entre nature, tradition et tourisme thérapeutique place la région comme une référence unique. Pour beaucoup, ces cures restent leur dernier espoir face à des douleurs que la médecine classique n’a pas toujours réussi à apaiser.

Ainsi, chaque été, les sables ardents de Taghit et Béni Abbès deviennent le théâtre d’un rituel immuable : un pacte silencieux entre l’homme et la nature, où les dunes brûlantes se muent en remède ancestral contre les affections du corps et les fardeaux du temps.

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