Menaces sur le Tassili n’Ajjer : Braconnage et vandalisme risquent de détruire un trésor en Algérie
Le parc du Tassili n’Ajjer fait face à des défis de taille pour protéger ses trésors naturels et culturels.
Le parc du Tassili n’Ajjer, situé dans le sud-est de l’Algérie, est l’un des joyaux les plus précieux du patrimoine mondial. Inscrit au patrimoine de l’Unesco depuis 1982, ce vaste massif montagneux de 138 000 km² est souvent décrit comme le « plus grand musée d’art préhistorique du monde ». Il abrite une richesse unique en faune, flore et art rupestre, mais se trouve aujourd’hui confronté à des menaces graves qui mettent en péril son avenir.
Tassili n’Ajjer : Un état d’urgence pour la faune
Le département opérationnel de l’Office national du parc culturel du Tassili n’Ajjer a récemment lancé un cri d’alarme concernant l’intensification du braconnage dans la région de la Tadrart, au sud-est de Djanet. Lors d’une mission de surveillance au début du mois d’août, les gardiens ont constaté une forte diminution de la population de gazelles dorcas, une espèce protégée et menacée. Ce déclin inquiétant est attribué au braconnage illégal, malgré les efforts de protection en place.
Les dégâts du tourisme non réglementé
En parallèle, les vestiges préhistoriques du parc, y compris les célèbres peintures rupestres d’In-Oxam, subissent une dégradation inquiétante. Les inspecteurs ont noté que les parois fragiles des abris ornés étaient abîmées, principalement en raison de la présence de visiteurs indélicats. Les réseaux sociaux regorgent de témoignages et de photos montrant des actes de vandalisme, où des touristes endommagent les peintures et les gravures par des graffitis et d’autres formes de destruction.
En janvier 2022, une vidéo bouleversante partagée par une résidente d’In Amenas a révélé des gravures rupestres détachées à l’aide d’outils mécaniques. L’émotion de la vidéaste était intense : « J’ai été en larmes en découvrant ce spectacle désolant. C’est un crime impardonnable ! Ils sont en train de voler l’histoire de notre pays. Je vous implore d’agir immédiatement ! », a-t-elle supplié, appelant les autorités à intervenir.
Une afflux touristique en croissance en Algérie
Le parc du Tassili, longtemps délaissé en raison de l’insécurité liée à des groupes terroristes, connaît une affluence croissante depuis la réouverture de la région aux visiteurs. Avec l’ouverture d’une liaison aérienne directe entre Paris et Djanet par Air Algérie et un système de visa simplifié, le Grand Sud algérien a attiré environ 490 000 touristes en 2022-2023, selon Mokhtar Didouche, ministre du Tourisme et de l’Artisanat.
Malgré l’accompagnement systématique des touristes par des guides et parfois par des gendarmes, le parc reste difficile à surveiller en raison de son immensité. Les autorités locales doivent intensifier leurs efforts pour protéger ce patrimoine unique.
Un patrimoine inestimable en danger
Le Tassili n’Ajjer est non seulement un sanctuaire pour une faune et une flore diversifiées, incluant des espèces menacées comme le mouflon à manchettes et le cyprès de Duprez, mais il est aussi un témoin précieux des changements climatiques passés. Les gravures rupestres datant du néolithique offrent un aperçu inestimable sur les civilisations anciennes et l’évolution environnementale de la région.
Selon Farid Belbachir, enseignant-chercheur en biologie de la conservation, « la détérioration des peintures et le braconnage sont des problèmes récurrents dans le Sahara central. Cependant, il est important de ne pas tirer de conclusions hâtives sur l’extinction de la gazelle dorcas sans davantage de données. »
Vers une protection renforcée
Pour contrer ces menaces, l’Office national du parc culturel du Tassili n’Ajjer intensifie ses efforts de sensibilisation et plaide pour des ressources supplémentaires. Des appels sont lancés pour une meilleure protection du parc, une promotion d’un tourisme durable et une coopération accrue avec des organisations internationales.
Heureusement, l’été 2024 a apporté un répit inattendu. Le parc a connu des pluies exceptionnelles, dépassant de 1 000% les normes habituelles, transformant certaines vallées en véritables oasis. Ce phénomène rare offre un espoir pour la régénération de la faune et de la flore du Tassili, tout en soulignant la nécessité urgente de protéger et de préserver ce patrimoine mondial inestimable.