
Tourisme en Algérie : les prix des hôtels freinent les vacances des familles
Hôtels 5 étoiles, services 2 étoiles… et prix stratosphériques. Il est temps de dire stop.
À l’aube de la saison estivale, l’optimisme semble regagner les rangs des professionnels du tourisme en Algérie. L’espoir d’un été dynamique et riche en activités se profile, notamment avec la montée en puissance des voyages organisés, proposés aussi bien par des agences agréées que par des opérateurs privés disposant de leurs propres bus. Ces excursions ciblent non seulement les stations balnéaires, mais également les hammams, les forêts et les complexes de loisirs, ouvrant ainsi l’éventail des destinations bien au-delà du littoral.
Cependant, derrière cet enthousiasme apparent, une réalité économique contraint de nombreux Algériens à renoncer à leurs vacances. Les coûts des séjours, incluant transport, hébergement et restauration, restent inaccessibles pour une grande partie de la population, en particulier les ménages à revenus modestes.
C’est dans ce contexte que le docteur Mustapha Zebdi, président de l’Association algérienne de protection et d’orientation du consommateur, s’est exprimé pour souligner l’importance de démocratiser l’accès au tourisme local. Selon lui, il est impératif de ne pas réduire l’offre touristique aux seules plages, mais de promouvoir également les merveilles naturelles et culturelles de l’intérieur du pays. « Il est temps d’élargir la vision du tourisme estival à l’ensemble du territoire national, et cela passe par un encadrement légal rigoureux et une politique tarifaire plus juste », affirme-t-il.
Des hôtels chers, des services discutables
Parmi les principaux obstacles évoqués figure la disparité criante entre les prix pratiqués par les hôtels et la qualité des services offerts. Beaucoup d’établissements classés comme « haut de gamme » ne respectent ni les normes internationales ni les attentes de la clientèle. Les vacanciers dénoncent des chambres peu entretenues, un personnel peu qualifié et des prestations décevantes — le tout pour des tarifs parfois exorbitants.
Pour Mustapha Zebdi, une refonte de la grille tarifaire hôtelière est indispensable. Il plaide pour des mesures de contrôle plus strictes sur les services réellement fournis, afin d’aligner l’expérience client avec les standards revendiqués. Il appelle également à des sanctions contre les établissements abusifs et à une politique de protection du touriste local, trop souvent négligé au profit d’une clientèle étrangère fantasmée.
Un tourisme intérieur menacé
De son côté, Abdelwahab Boulfekhad, président de la Fédération nationale de l’hôtellerie et du tourisme, partage ce constat préoccupant. Il reconnaît que certaines pratiques tarifaires nuisent à la compétitivité du secteur et freinent le développement du tourisme intérieur. Il insiste sur le rôle des autorités dans la régulation des prix et le contrôle des infrastructures touristiques, tout en encourageant la concurrence saine entre hôtels pour rehausser la qualité globale.
Boulfekhad note que la récente augmentation du nombre d’hôtels sur le littoral est une opportunité pour améliorer les standards grâce à la pression concurrentielle. Toutefois, cela reste insuffisant, car de nombreuses zones touristiques, notamment dans le Sud et les Hauts Plateaux, manquent cruellement d’infrastructures adaptées aux attentes des visiteurs.
La fédération œuvre également à faciliter l’accès au foncier touristique pour encourager les investissements, mais reste lucide quant aux nombreux défis à relever, notamment l’écart entre les prix pratiqués et le pouvoir d’achat des Algériens.
Vers un tourisme plus inclusif ?
La clé du développement d’un tourisme estival florissant en Algérie réside sans doute dans une politique hôtelière plus inclusive, équitable et orientée vers le citoyen local. Offrir à tous la possibilité de découvrir leur pays dans des conditions dignes et accessibles, c’est non seulement renforcer l’économie nationale, mais aussi raviver le lien entre les Algériens et leur patrimoine.
Face aux enjeux de pouvoir d’achat et de qualité de service, l’État est appelé à prendre des mesures fermes et urgentes. Le tourisme ne peut pas être réservé à une élite, il doit devenir un droit accessible à chaque citoyen — pour un été vraiment algérien.