
Miley Cyrus et le Karakou algérien : la ressemblance qui fait débat
Miley Cyrus relance le débat sur la reconnaissance des tenues traditionnelles algériennes
Lors d’un récent événement à New York, la chanteuse et icône de mode américaine Miley Cyrus est apparue vêtue d’un ensemble brodé qui a immédiatement capté l’attention… surtout en Algérie. Sa tenue, signée par la maison Thom Browne, a été perçue par de nombreux internautes comme une relecture contemporaine du Karakou algérois, une pièce traditionnelle emblématique du patrimoine vestimentaire algérien.
Si cette apparition a séduit par son élégance, elle a aussi rouvert un débat récurrent dans le monde de la mode mondiale : où s’arrête l’inspiration et où commence l’appropriation culturelle ?
Un clin d’œil involontaire à l’Algérie ?
C’est à l’hôtel Carlyle, lors d’une réception privée, que Miley Cyrus a fait son entrée dans un ensemble blanc composé d’une jupe cintrée et d’une veste richement brodée de motifs dorés. Avec ses épaules structurées, ses manches longues et son brocart lumineux, la tenue a suscité un déjà-vu saisissant auprès des internautes algériens.
Le Karakou — costume de cérémonie algérois hérité du XIXe siècle — est précisément connu pour ses vestes en velours brodées au fil d’or, son allure royale et ses lignes élégantes. Qu’il soit porté lors d’un mariage ou d’une fête traditionnelle, il incarne un savoir-faire artisanal transmis de génération en génération.
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Mais ni Thom Browne, le créateur du vêtement, ni Miley Cyrus n’ont fait de référence explicite à cette ressemblance. Ce silence a vite été perçu par beaucoup comme un manque de reconnaissance culturelle, voire une forme de réappropriation silencieuse.
L’ombre persistante de l’appropriation culturelle
Ce n’est pas une première. En février 2025, Chanel avait déjà été pointée du doigt après avoir présenté une robe inspirée de la tenue traditionnelle Naili lors de la Fashion Week de Paris. Là encore, aucune mention des origines n’avait été faite, malgré la similitude frappante dans la coupe, le tissu, les ornements et même les accessoires.
Plus récemment encore, lors de la dernière édition de la Semaine de la haute couture à Paris, la célèbre maison Schiaparelli a dévoilé une collection hivernale dont plusieurs pièces évoquaient clairement le Karakou algérien. Dirigée par le créateur Daniel Roseberry, cette ligne baptisée Retour vers le futur a été saluée pour son audace artistique… mais a aussi déclenché l’indignation. Le raffinement des broderies, la coupe royale et les textures inspirées des tenues algéroises étaient évidents — pourtant, aucune référence au patrimoine algérien n’a été faite.
Face à ces cas répétés, de nombreux créateurs algériens s’interrogent : la mode occidentale de luxe célèbre-t-elle nos traditions ou les efface-t-elle subtilement pour mieux les revaloriser à son compte ?
Le Karakou : entre héritage vivant et modernité internationale
Pour comprendre l’émotion suscitée par cette tenue, il faut mesurer la valeur symbolique du Karakou. Né dans les salons d’Alger au XIXe siècle, ce costume a évolué tout en conservant une forte charge identitaire. Confectionné en velours, brodé selon la technique traditionnelle du Mejboud ou Fetla, il est souvent associé à un Seroual Chelka ou Mdewer, des pantalons bouffants typiques.
Autrefois accompagné du Khit Errouh, d’une Chachia ou encore de la M’harmette el Ftoul, le Karakou a su se réinventer pour séduire une nouvelle génération tout en conservant son essence artisanale et sa noblesse d’origine.
Aujourd’hui, il se décline en version haute couture, revisité par de jeunes stylistes algériens. Il défile à Paris, Dubaï ou Istanbul, mais toujours en tant qu’ambassadeur du patrimoine algérien.

Un dialogue à construire, pas à ignorer
La polémique autour de Miley Cyrus ne relève pas d’un rejet de la reconnaissance, mais plutôt d’un appel à la juste attribution. Lorsque des maisons de luxe s’inspirent de cultures riches et vivantes, un minimum de reconnaissance ne devrait pas être optionnel. C’est une question de respect, mais aussi d’échange culturel sain.
Après tout, l’art vestimentaire, tout comme la musique ou la danse, traverse les frontières. Mais pour que ces traversées soient enrichissantes pour tous, elles doivent s’accompagner de crédits explicites, de collaborations équitables, et d’une réelle curiosité pour l’histoire des pièces qu’on admire.