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Le Dr Ahcene Rekis, « médecin des pauvres », tire sa révérence

Le cabinet du Dr Rekis, modeste par l’apparence, immense par l’impact humain.

C’est une figure immense de l’humanisme médical en Algérie qui s’est éteinte ce jeudi 17 juillet 2025. Le docteur Ahcene Rekis, affectueusement surnommé le « médecin des pauvres », est décédé à l’âge de 84 ans, laissant derrière lui un héritage moral et humain d’une rare profondeur.

À Akbou, dans la wilaya de Béjaïa, mais aussi dans toute la région de Kabylie, l’émotion est vive, les hommages se multiplient, et les témoignages affluent sur les réseaux sociaux pour saluer la mémoire d’un homme dont la vie fut entièrement dédiée au service des autres.

Né en 1941 à Sidi Yakoub, dans le village d’Ikhentouchen, commune de Larbaâ Nath Irathen (Tizi Ouzou), le Dr Rekis grandit dans une Algérie coloniale marquée par la misère et la répression. Ce contexte difficile, sans doute, a forgé chez lui une sensibilité particulière envers les plus démunis, une empathie inaltérable, et un sens du devoir médical inébranlable.

Une vocation plus qu’un métier

Diplômé de médecine en pleine période post-indépendance, il commence à exercer en 1972 dans un modeste cabinet situé rue de la Santé, à Akbou. Rapidement, il se fait connaître non seulement pour ses compétences, mais surtout pour sa générosité exceptionnelle. Pendant plus de 50 ans, il a soigné des milliers de patients, souvent gratuitement. Il devinait, à travers un regard, un habit usé, un silence gêné, la détresse économique de ceux qui franchissaient sa porte.

Mais là où d’autres réclament des honoraires, le Dr Rekis glissait parfois un billet à ses patients pour leur permettre d’acheter leurs médicaments. Ce geste, répété des centaines de fois, en a fait un médecin hors norme, respecté bien au-delà du cercle médical.

Dr Ahcene Rekis : l’humanisme chevillé au corps

« Le médecin doit soigner les indigents gratuitement », déclarait-il encore récemment. Pour lui, ce principe n’était pas une posture, mais un impératif moral. Il rappelait avec fermeté que les médecins algériens avaient été formés grâce aux deniers publics, et qu’en retour, il était juste de rendre à la population ce qu’elle avait investi.

Son cabinet ne désemplissait jamais. Des patients venaient de toute la région, parfois de plusieurs wilayas, convaincus qu’au-delà du stéthoscope et de l’ordonnance, ils trouveraient une écoute, un réconfort, une chaleur humaine devenue rare dans les systèmes médicaux modernes.

Un homme, une philosophie de vie

Le Dr Rekis pratiquait une médecine de proximité, mais surtout une médecine du cœur. Il ne se contentait pas de diagnostiquer, il écoutait longuement, rassurait avec une voix posée, prenait le temps là où tant d’autres expédient. Il n’hésitait pas à effectuer des visites à domicile, à se déplacer pour des patients âgés ou isolés, y compris les jours fériés.

Son engagement n’était ni politique, ni intéressé. Il puisait dans une éthique personnelle nourrie par l’Histoire, la foi, et un profond respect de la dignité humaine. À travers son action, il incarnait une vision rare et précieuse du service public, celle du don de soi sans attente de retour.

Une disparition qui laisse un vide immense

Le décès du Dr Ahcene Rekis a suscité une immense vague d’émotion. Sur les réseaux sociaux, les hommages se multiplient : « Il était bien plus qu’un médecin », écrit un internaute bouleversé, « il était une lumière pour tous ceux qui l’ont croisé. » Les mots reviennent comme des refrains : humble, généreux, discret, profondément humain.

Son départ laisse un vide difficile à combler. Mais son exemple continuera d’inspirer les jeunes générations de médecins, de soignants et de citoyens. Dans une époque souvent marquée par l’individualisme, le parcours du Dr Rekis rappelle que le soin, au sens le plus noble, est d’abord un acte d’amour.

Il s’en est allé dans la discrétion, comme il a toujours vécu. Mais son empreinte restera indélébile. À Akbou et ailleurs, son nom est désormais associé à une idée simple mais puissante : celle d’un homme qui a choisi de soigner avec le cœur.

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