
Alger, nouvelle scène culinaire où la Chine s’invite
Zhao Jun, restaurateur chinois, attire de plus en plus de clients algériens avec ses nouilles halal.
Longtemps éloignée des grandes routes du tourisme international, l’Algérie commence peu à peu à se réinventer comme destination à découvrir. Sa capitale, Alger, réputée pour ses paysages méditerranéens et sa vie culturelle foisonnante, dévoile aujourd’hui une nouvelle facette plus inattendue : l’émergence de la cuisine chinoise dans ses rues et ses marchés. Un phénomène discret mais grandissant, qui traduit les changements sociaux et économiques à l’œuvre dans le pays.
Le célèbre média américain Christian Science Monitor s’est intéressé à cette évolution méconnue de la capitale algérienne et lui a consacré un long reportage, publié lundi 22 septembre, mettant en avant cette rencontre culinaire inattendue entre traditions locales et influences chinoises.
Une capitale entre tradition et modernité culinaire
La street food algérienne, riche de spécialités locales comme les mhajeb, le karantika ou les brochettes grillées, a toujours été au cœur de la vie urbaine. Ces mets populaires, accessibles et savoureux, constituent l’identité gastronomique d’Alger. Mais depuis peu, un autre parfum s’ajoute au paysage culinaire de la capitale : celui des nouilles, du tofu et des sauces soja.
En 2022, Zhao Jun, un ressortissant chinois arrivé en Algérie, constate qu’aucun restaurant ne propose de nouilles halal dans la ville. Deux ans plus tard, il ouvre son propre établissement. À l’origine, l’idée était simple : offrir aux expatriés chinois un lieu où retrouver un peu du goût de leur pays. Pourtant, le pari a rapidement dépassé les attentes. Aujourd’hui, plus de la moitié de ses clients sont des Algériens, curieux de s’ouvrir à de nouvelles saveurs.
Une diaspora chinoise influente
L’essor de ces nouvelles adresses culinaires n’est pas un hasard. Depuis une dizaine d’années, et plus encore dans le cadre de la coopération économique algéro-chinoise, de nombreuses entreprises venues de Chine s’installent sur le territoire. Selon les estimations, près de 35 000 ressortissants chinois vivent en Algérie, ce qui en fait l’une des plus importantes communautés étrangères du pays.
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Cette présence se reflète naturellement dans le tissu social et économique algérien, et la gastronomie constitue l’un des vecteurs les plus visibles de cet échange culturel. Ainsi, restaurants, supérettes et même marchés populaires s’adaptent pour répondre à cette demande nouvelle.
Quand les marchés d’Alger se parent d’exotisme
Dans un marché en plein air d’Alger, un commerçant algérien propose désormais des produits importés d’Asie : nouilles sèches, feuilles de riz, tofu frais, gingembre ou encore sauce soja. « Au départ, mes clients étaient presque tous chinois, mais aujourd’hui, de plus en plus d’Algériens viennent acheter ces produits », explique-t-il.
Autour de lui, d’autres étals affichent des légumes jusque-là peu connus des consommateurs locaux : haricots longs, melon amer, radis daikon. Des ingrédients qui, petit à petit, trouvent leur place dans les recettes familiales algériennes, souvent testées par curiosité avant de devenir des habitudes culinaires.
Une mosaïque linguistique au service de la gastronomie
Face à cette nouvelle clientèle diversifiée, les commerçants s’ajustent avec souplesse. Mandarin approximatif pour les clients chinois, anglais ou français pour les visiteurs étrangers, dialecte algérien pour les locaux : la barrière linguistique se transforme plutôt en passerelle. Ce mélange de langues et de cultures illustre à lui seul la dynamique cosmopolite qui anime aujourd’hui Alger.
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Une opportunité touristique
Pour les visiteurs étrangers, cette évolution est une double découverte. L’Algérie se dévoile à travers sa gastronomie traditionnelle, avec ses marchés aux épices et ses restaurants typiques, mais également à travers une ouverture sur le monde incarnée par la présence croissante de la cuisine chinoise. Un contraste qui enrichit l’expérience touristique et qui participe à briser l’image d’une Algérie figée dans une identité unique.
Au croisement de la culture, de l’économie et du goût, cette rencontre culinaire entre Alger et la Chine illustre la lente mais réelle transformation de la capitale algérienne. Entre tradition locale et influences étrangères, la ville semble prête à écrire une nouvelle page de son histoire gastronomique.